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Je suis autiste, et après ?

diagnostic autisme adulte

Avant de me lancer (enfin) dans la démarche diagnostique de l’autisme, je me suis longtemps interrogé sur la pertinence de le faire. Qu’est-ce que ça m’apporterait, si ce n’est une étiquette supplémentaire ? Quel intérêt une fois adulte ? Plein de questions légitimes et qui nous immobilisent. Les événements ont fait que finalement, j’ai sauté le pas, et ça a été TRES bénéfique, bien que pas facile à gérer. Mais, je peux vous donner maintenant les 6 choses que j’ai appris sur moi grâce au diagnostic. Apprendre à se connaître pour enfin vivre et se créer une vie plus agréable, plus alignée. Si vous hésitez à sauter le pas, j’espère que cela vous aidera à vous décider !

Je suis un caméléon (et ce n’est pas qu’une bonne chose)

Le principal souci quand on se fait dépister adulte (et même enfant d’ailleurs !), c’est que bien souvent, nous avons appris à « nous adapter », c’est-à-dire à masquer notre autisme. Véritables maîtres du camouflage, cela pose problème, notamment au moment de demander l’aide de professionnels, puisque la réponse est souvent la même : « mais non vous ne pouvez pas être autiste, vous parlez bien, vous regardez dans les yeux, vous avez un emploi, une famille, etc. ». Donc nous n’entamons pas le diagnostic de l’autisme adulte ! Et l’errance médicale continue.

Au quotidien, tous ces efforts pour rentrer dans les cases, correspondre aux critères sociaux, mener une vie jugée « normale » ou « convenable », sont épuisants. La peur du rejet, de l’erreur, de l’exclusion demande une adaptation constante, qui entraîne une fatigue chronique, du stress, des troubles du sommeil, etc. Le corps et l’esprit sont en lutte tous les jours ou presque, avec plus ou moins de résultats. Le diagnostic m’a fait réaliser à quel point je compensais, y compris pour les plus petites choses. Et, consciemment ou non, mon cerveau a « lâché » sur beaucoup de points. Je n’essaie plus d’être une personne qui ne me ressemble pas. Etre « officiellement » autiste m’a donné une sorte de légitimité, une autorisation d’être – ENFIN – moi-même. Je dirais même que je découvre qui je suis, loin de cette pression de devoir rentrer absolument dans un moule.

Je ne serai jamais parfaite ou standard (et c’est pas grave !)

J’ai passé 30 ans à essayer de satisfaire les attentes de tout le monde : mes parents, la société, mes patrons, mes proches, en me mettant une pression de dingue. Sauf que…et bien ces exigences sont bien trop élevées pour moi, pour ma santé mentale. Et c’est ok. Atteindre les standards de la société, c’est juste trop, et clairement nocif pour mon bien-être. Il n’y a qu’à constater le nombre de burn-out que j’ai fait en 15 ans d’activité professionnelle, et même à l’école ou pendant mes études. Alors que j’étais toujours impliquée à 200 %. Déprimant.

C’est impossible de cumuler autonomie-emploi-famille-couple-vie sociale pour une grande majorité d’autiste. C’est beaucoup trop. Ce n’est pas une question d’effort à faire, c’est une manière différente de vivre et percevoir le monde. Donc la formule de réussite telle que présentée par la société ne peut pas tout simplement pas s’appliquer à tous. Tant pis, vivre autrement, c’est aussi enrichissant quand on est pas obligé d’y laisser sa santé !

J’ai besoin de repos (et de cuillères)

Je ne sais pas si vous connaissez la théorie des cuillères de Christine Miserandino (vous pouvez la retrouver ici), mais clairement, je ne commence pas chaque jour avec un stock à bloc. La fatigabilité fait partie de l’autisme, et j’ai besoin de plus de repos qu’une personne lambda. Pas par flemme, parce qu’il y a vraiment des activités qui me réclame une énergie folle. Ce qui implique de faire des choix dans la journée : je conduis 30 minutes, je prépare à manger ou je prends une douche ? Il y a des jours où les 3 sont possibles, et d’autres où me laver relève de l’effort olympique.

Parmi les activités énergivores, toutes les activités sociales me demandent beaucoup d’énergie. Aller au travail, à un repas de famille, faire les courses, même juste parler avec mes enfants et mon mari parfois, c’est fatiguant. Et j’ai besoin de récupérer pour continuer à fonctionner. Pour cela, il me faut du temps, seule, pour recharger mes batteries. Et non, « une petite sieste » ne suffit pas 😉 Il s’agit de me plonger dans un intérêt restreint, ou de méditer, de rester dans le noir et le silence, ça dépend des jours. C’est totalement ok de prendre tout le temps nécessaire pour retrouver un état stable. Tout ça, je l’ai compris grâce au diagnostic de l’autisme adulte !

Se connaître pour mieux se respecter 😉

Je ne suis pas dépressive (ou bipolaire)

Pendant plus de 20 ans, j’ai rencontré divers professionnels de santé mentale qui ont posé des diagnostics divers et variés, de la dépression à la bipolarité. Bon, les symptômes ne collaient pas totalement et les anti-dépresseurs n’ont jamais fonctionné, mais va pour la dépression. Ce qu’ils ont tous pris pour des épisodes dépressifs sont en fait des meltdowns et shutdowns, consécutifs…à des surcharges émotionnelles. Découvrir leur existence, tout ce qu’il y a de plus classique chez les autistes, a été une révélation pour moi. Et pour la psychiatre qui me suit depuis 2 ans 😅 Je ne suis donc pas dépressive, pas malade, et je n’ai pas besoin de me gaver de médicament pour « régler le problème ». Il n’y a pas de médicament qui guérit l’autisme 😉 La prise en charge est du coup radicalement différente.

Les réactions excessives, le repli sur soi, les crises de larmes ou de colère, résultent dans la très grande majorité des cas, d’une surcharge sensorielle ou émotionnelle et d’une incompréhension. J’ai toujours pensé qu’il fallait « gommer » ces comportements, socialement peu adaptés, j’ai d’ailleurs beaucoup travaillé là-dessus avec plusieurs psychologues, sans jamais obtenir les résultats attendus. Je travaille toujours la gestion, mais surtout la reconnaissance, de mes émotions. J’apprends à identifier les nuances dont je n’avais absolument pas conscience, et à réagir de manière « acceptable », voire à réagir tout court. Et bien sûr, je respecte mon besoin de récupération et le temps qu’il me faut pour intégrer les choses.

Je suis régulièrement submergée

Dans le « package autisme », il y a des hypo et des hypersensibilités. Bingo, j’ai gagné plutôt des trop que des pas assez moi 😂 Mon profil sensoriel est édifiant ! Le diagnostic de l’autisme adulte apporte un tas de réponse rien que grâce à ce profil sensoriel. Le bruit, la lumière, les odeurs, les troubles et l’hypersélectivité alimentaires, le choix des vêtements, tout ça est explicable !

Le fonctionnement cognitif particulier des autistes fait en sorte que tous les stimuli et toutes les informations arrivent au même niveau et sont traitées en même temps. Comme si le cerveau était bombardé en permanence d’une quantité incroyable d’informations à traiter, vite de préférence. D’où l’impression d’être vite submergée. Et celle de « cerveau qui s’arrête jamais » qui a l’air d’être assez récurrente chez les asperger que j’ai croisé.

Maintenant que j’en ai conscience, j’apprends à poser des limites. A dire stop au milieu d’une conversation trop longue par exemple, ou à choisir les informations que je vais traiter. J’évite de faire une activité qui me demande de la concentration dans un environnement bruyant ou avec du monde autour. C’est beaucoup d’info sensorielles à assimiler en peu de temps.

Je ne suis pas seule, ni folle

Quand on a l’impression de vivre au milieu d’un monde incompréhensible, voire hostile, on a vite fait de se sentir bien seule. Ou de dérailler complètement. Pourquoi les autres sont-ils si différents, et pourquoi les choses ont l’air si « faciles », « naturelles » pour eux ? Le diagnostic de l’autisme adulte m’a poussée à vouloir rencontrer (virtuellement !) mes « semblables ». Et devinez quoi ? Nous sommes nombreux à connaître ces difficultés quotidiennes ! A planifier soigneusement chaque trajet, à respecter à la lettre des rituels absolument vitaux, à stresser avant chaque rdv, à négliger ma santé parce que c’est une épreuve trop importante d’aller chez le dentiste, le gynéco ou le généraliste ou à ne manger que des lasagnes aux courgettes le mardi soir.

Quel réconfort de ne plus être seule face à l’adversité. Les choses ne sont pas plus faciles pour autant, mais je ne suis plus seule. Et contrairement aux idées reçues, il y a une vraie communauté, des liens, qui se nouent entre personnes autistes. Alors oui, c’est souvent maladroit, atypique, avec un franc-parler parfois désarmant et peu de filtres, mais c’est génial ! Le partage est là, le conflit aussi parfois, comme dans une vie « normale » finalement. Mais tous calés sur un mode de communication similaire. Pas besoin de mode d’emploi ou de se cacher 😉C’est un véritable chemin vers l’acceptation de soi, du diagnostic de l’autisme adulte, et même un « droit » d’exister.

Si vous êtes dans une démarche diagnostic de l’autisme adulte, ou que vous avez déjà votre diagnostic d’autisme, je ne peux que vous encourager à rejoindre des groupes « spécifiques ». Que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans des cafés asperger, des associations, côtoyer des personnes qui nous ressemble est un vrai soulagement !

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